28/10/2013

CRITIQUE : C'EST LA FIN (This is the End - Evan Goldberg & Seth Rogen - 2013)

APOOCALYPSE NOW

Quelque part à Hollywood...


Seth Rogen : - Dites les potes, ça vous brancherait de participer à mon prochain film ? On serait tous là en train de glander, de fumer de l'herbe et de faire des conneries, le tout durant la fin du monde ?

Frat Pack (en tout cas une partie) : - Carrément !

     J’écris peut-être des bêtises mais je ne pense pas être très loin de la réalité. Première réalisation du tandem Seth Rogen et Evan Goldberg, doté d'un casting à faire bander n'importe quel fan de comédie US, This is the End correspond parfaitement aux attentes : un humour omniprésent, des situations et dialogues tirés aux couteaux, ainsi que des blagues de vomi/pipi/caca... Tout est là.



     L'histoire est simple. Jay Baruchel, jeune comédien canadien, vient passer quelques jours chez son ami d'enfance Seth Rogen, vivant à Los Angeles. Alors qu'ils sont invités à une fête chez James Franco, l'Apocalypse se répand sur Terre. Tiré d'un court métrage Jay and Seth versus the Apocalypse de Jason Stone, le film reprend les bases du genre qu'est le huis-clos. Les individus s'enferment, isolés du monde et tentant de cohabiter malgré leurs ego surdimensionnés. On retrouve par dessus le contexte de fin du monde et le pardon qui les sauvera de l'Apocalypse comme l'est indiqué dans le sacro-saint livre à l'usage de n'importe quel curé (enfin après Playboy).

     Force est de constater que la plupart du casting essaie de casser leur image, n’hésitant pas à en rajouter une tonne dans leurs dialogues. Par exemple Michael Cera en cocaïnomane et sex addict, Jonah Hill en homo refoulé se comportant comme une véritable vipère, James Franco fringué comme un hipster sortant de chez Emmaüs, ou encore Dany McBride agissant purement et simplement comme un vrai connard. C'est gras, gratuit et à contre-emploi pour certains. Pour ma part, ils n’interprètent pas de rôles, ils ne font que jouer pour un pote (Rogen, je le précise à nouveau), qui leur laisse une énorme marge de liberté entre chaque situation. Et ça marche ! Chaque scène de Dany McBride est un véritable délice tant il va loin dans ses gimmicks et références.


       Le terme qui qualifierait parfaitement le film serait l’autodérision. Cela va jusqu'aux dialogues improbables, en passant par la musique et surtout aux acteurs imbus d'eux-mêmes. Aucun n'est épargné. Ce sentiment est décuplé par le fait qu'ils jouent leur propre rôle. C'est d'autant plus drôle de voir un James Franco se moquer de lui-même et de sa carrière alors qu'il est toujours autant bankable à Hollywood. Certaines piques montrent également leurs ''erreurs'' passées en terme de choix de rôle ou de film. Cette ironie signale leur rapprochement avec le spectateur, généralement habitué à regarder ce genre de film. Le long-métrage est proche du gouffre qu'est le fan service mais l’évite de justesse. Certaines allusions sont loin d'être de simples clins d’œil.

          En ce qui concerne la relation entre Jay et Seth, celle-ci donne un peu plus de profondeur à l'histoire, donnant un ton beaucoup plus sérieux par rapport au reste. Il est question ici d'une amitié qui, au fil du temps et de l’éloignement, se dégrade naturellement. On retrouve à peu près le même thème dans The World's End d'Edgar Wright. Mais film américain oblige, se termine par un happy end des plus légers. Ce qui est bien dommage.

           Finissons d'ailleurs la comparaison avec le long-métrage du jeune britannique, This is the End reste très loin du niveau de Wright, notamment en matière de réalisation et de mise en scène. Il manque un vrai cinéaste derrière un tel projet qui aurait mérité plus d'ambition. De plus le film m'a laissé un goût d'inachevé, oscillant entre blague lourde et excellente. Un problème de rythme se fait d'ailleurs ressentir dès le milieu du film, coincé par le système du huis-clos. Un milieu d'une simplicité affligeante : « Alors les personnages tournent en rond, font des trucs, avant que l'un d'eux décident de sortir ». La bande originale est quant à elle ultra clichée et tape dans le gras. Concernant les effets spéciaux, cela se situe entre le bon et le raté. Dommage car il y avait de quoi faire avec un tel sujet.

              Toutefois le film mérite d'être visionné rien que pour la performance de Dany McBride, pur génie de la comédie. Pour ceux qui ne le connaissent pas, je vous conseille sa série East Bound and Down. Par contre Seth Rogen, peut-être à cause de sa double casquette de réalisateur, se contente du minimum syndical. Enfin du côté de Jonah Hill, Michael Cera et James Franco, ils se foutent royalement de l'image qu'ils peuvent donner. De plus, le côté religieux est clairement montré comme un simple prétexte à l'histoire, et non pas défini comme un acte moralisateur ou putassier. Cela fait plaisir à voir. On est donc à mille lieux des nombreux blockbusters et de leurs sous-entendus sur la religion. Fourre-tout monstrueux de conneries, de WTF bien placés et doté d'un vrai sens planqué derrière cet amas d'humour graveleux, This is the End fait partie de ces comédies US qui remplissent à plein régime leur quota de sympathie.

Un bon film, ni plus ni moins. Suffisant pour attendre Anchorman 2.


Roland

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