20/10/2015

CRITIQUE : THE VISIT (M. Night Shyamalan - 2015)

S.O.S 
CAPITAINE ABANDONNE LE NAVIRE

SOS comme "Sh... Of Shyamalan"


       Cher(e)s ami(e)s, l'heure est grave. La face du DWARF est sur le point de changer à tout jamais. Marquons ce jour d'une pierre blanche afin de se souvenir longtemps de cet événement absolument unique dans toute l'histoire du blog : 

Charlotte vient de pondre sa première critique négative !!! 

       Du fiel, du dégoût, des insultes.. Tout y passe, vous êtes prévenus. Mais êtes-vous prêts ?

Mercredi 7 octobre, 22h et quelques. Je suis triste. Je ne dirais pas que mon monde s'écroule, mais je viens de faire une très mauvaise rencontre, avec quelqu'un que je pensais bien connaître.


  Une question, M. Night Shyamalan : Pourquoi avons-nous eu sous les yeux pendant un peu plus d'une heure trente, un cinéma qui ne prend pas parti, qui renonce ?

        Les nombreux renoncements du film sont la raison de ce SOS.


Shy fait d'abord le choix d'une fausse famille au lieu de la famille bancale mais soudée qui faisait tout le bonheur et la richesse de son cinéma jusqu'à maintenant. Nous expliquerons pourquoi elle est fausse. Dans un premier temps, à la famille est reliée la maison, et il détruit devant nos yeux effarés la belle utilisation qu'il faisait de la maison familiale et de ses différents niveaux (physiques et psychologiques). Dans Signes, on se rappelle que l'investissement d'un lieu normalement familier se faisait lentement et douloureusement, que ses occupants y apprenaient à côtoyer l'absence, que les différentes pièces étaient les unes après les autres l'espace scénique du drame : salle à manger où une crise éclate, salon/télévision qui fait se diviser l'opinion, jardin/cour où la menace rôde, ou encore bien sûr la cave comme apprentissage du deuil, résolution des cassures et retour de la quiétude.

Dans The Visit, nous retrouvons la cave, et si elle nous promet un temps de frayeur classiquement éclairé à la lampe de poche tremblotante, elle n'abritera finalement que violence presque voyeuriste où l'image n'est plus que monstration et plus du tout signification. Cela aurait pu n'être qu'une victoire de la mocheté, c'est un brin plus douloureux quand on sait que Shyamalan mettait jusqu'à maintenant et en grande partie la signification au cœur de ses plans, des images travaillées qui faisaient dire, à nous spectateurs et à ses personnages, une vérité qui dépassait la première vision. Il fallait voir au-delà, comprendre sous les monstres, l'enfoui et l'invisible étant deux des motifs du réalisateur (des signes, un sixième sens, un faux village, le récit pour dire le vrai dans Incassable ou La Jeune fille de l'eau). Échoue dans The Visit un simple et gratuit premier degré. Rien sous les décors, rien sous ces gosses arrivant chez leurs grands-parents qu'ils ne connaissent pas, rien sous cette caméra portée par la fille tout du long. Rien sous cette vieille sorcière hirsute grattant les murs à poil la nuit (…), rien sous cette histoire de couches (… LOL).

Cette caméra justement. Si faire s'exprimer l'ado et l'enfant en leur mettant dans les mains le moyen de montrer cette histoire est une idée plaisante, et pour le coup shyamalienne, cela devient le prétexte du décalage, du bancal, du champ limité, du non filmé. Comme si Shy abandonnait son propre navire. Mes personnages filment, je ne suis plus là, démerdez-vous. Il déserte la symétrie, les reflets, les miroirs qui étaient chez lui des motifs pertinents bousculés peu à peu par la cassure du drame et du fantastique, motifs passionnants pour un réal se racontant à chaque film, également passionnants pour les amoureux du cinéma. Nous nous asseyons dans des salles obscures pour voir des images qui RÉSONNENT.
Ce renoncement est plus marqué encore par, cerise sur le gâteau du caca, la toute dernière scène qui se veut le bonus du film final de la fille, un petit rap inspiré du frérot qui narre ce qu'il vient de vivre en faisant rimer (de mémoire) « chiasse », « face », « pétasse »... Veuillez m'excuser d'autant d'approximations, si j'avais imaginé tant de proses, j'aurais sorti mon carnet. Bref, si l'on n'avait pas compris que son film était nul, ce petit bonus rap nous fait l'effet d'un MacDo aussitôt mangé aussitôt digéré : vous n'avez rien vu !

Malheureusement, j'ai vu. J'ai TRÈS bien vu, Shy, car j'examine toujours tes films avec attention. Il manquait plus qu'un Johnny Depp au cast pour ajouter un peu d'abandon à la tambouille – pardon ceci est un autre sujet.
Revenons à nos moutons. Si les derniers films de Shyamalan étaient moins bons, il n'avait jamais abandonné ses personnages pour autant. Il a toujours cru en eux; ils résonnaient toujours très clairement dans sa mythologie personnelle (même les mal aimés Smith senior et junior d'After Earth, je vous l'assure). Si l'enfant est ici pas forcément en inadéquation avec les précédents -légèrement livré à lui-même, face à un adulte défaillant-, il est beaucoup beaucoup moins complexe que Cole, Bo et Morgan, extrêmement peu attachant et ne livre pas d'histoire qui attise un tant soit peu d'intérêt ; il est en plus écrasé par une VF affreuse.

  L'autre personnage shyamalien par définition, le monstre ou la créature, devient ici caricatural, guignolesque, inutile et comme acheté à un autre univers, avec 50% de remise. Il faut que j'arrête de revenir aux précédents longs-métrages du réalisateur, mais si vous prenez le temps de les voir ou les revoir, le monstre y a toujours été double, ambigu, révélateur d'une vérité sur les protagonistes. Ici il sert juste à effrayer la caméra d'une fillette qui balancera sa vidéo sur You tube une fois de retour chez elle, elle aura des likes, et puis au clic suivant on passera à la suite. Triste écho du monde contemporain. Il fut un temps où les films de Shy étaient beaucoup plus intelligemment empreints du monde d'aujourd'hui (voir Le Village).

Enfin, je ne sais pas trop si il y a un intérêt à vous prévenir du spoiler (toutefois c'est fait), mais ces grands-parents hystériques ne sont pas vraiment de la famille des bambins – d'où la fausse famille précédemment évoquée. Pas d'intérêt donc pour l'évolution scénaristique des persos. Bon, les deux vioques pourraient simplement faire peur, comme Shy semble avoir pris le parti des films d'horreur sans âme destinés à patienter le temps de finir son paquet de pop corn. Mais c'est encore raté, malgré un essai de cache-cache où la grand-ma s'incruste, ou encore un des seuls plans sympas du film, celui où cette même charmante dame s'empare de la caméra cachée dans un coin du salon et s'offre un ptit selfie – enfin je dis plan sympa, mais on va dire marrant, j'ai pas forcément compris s'il y avait un sens ou pas à la chose.
Laborieusement, Shy essaye de nous glisser un Hansel et Gretel remember (épisode du four), mais ça ne colle pas puisque tout est raté.

Mon cher Night, pour terminer, je n'aurais qu'un conseil, insignifiante petite cinéphile que je suis mais grande fan de toi. Fais une pause, prends des vacances dans les bois, dans une petite cabane abandonnée où le vent te soufflera des choses que toi seul comprendras, et que tu sauras nous retranscrire dans tes prochains films. Remets tes lunettes, éteins l'ordi, retrouve l'enfant qui était en toi. Fais nous peur, bordel. Sinon, tu vas rejoindre ceux qui se sont perdus en route et qui grossissent les rangs du panthéon de la tristesse cinématographique, un lieu qui ressemble à cette maison que tu as si mal filmée aujourd'hui. Et ainsi tu éviteras de nous faire mal au bidou.

Coucou ! C'est Mamie !
CHARLOTTE

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire