LES SEPT PÉCHÉS CAPITAUX
Ces derniers temps Frears revient là où on ne l'attend pas. Il
récidive donc en s'appuyant sur l'un des personnages les plus
controversés du sport moderne : Lance Armstrong.
D'un point de vue technique, la réalisation est impeccable. Frears
montre toute ses qualités et expériences acquises au fil des ans.
Il s'offre cependant quelques moments de folies à travers une mise en
scène des plus sobres, avec de somptueux décadrages, soulignant à
la fois un côté très esthétisant que souhaite donner Frears au
film, mais souligne également l'égocentricité et la perte de
notion de valeurs d'Armstrong. Franchement, j'ai rarement vu des décadrages aussi beaux et forts ces dernières années. C'est pas du Battlefield Earth, ça c'est sûr.
Au niveau du casting, le résultat est plus contrasté. Ben Foster est
absolument génial dans le rôle du texan et reçoit enfin un grand
rôle à la hauteur de son talent. Il n'est plus un faire valoir des
grandes stars et le fait savoir. Chris O'Dowd campe un David Walsh
plus que droit dans ses bottes, Denis Ménochet (Johan Bruyneel) est
à la hauteur du poids du bonhomme.
Quant à Jesse Plemons, jeune révélation de la dernière saison de Breaking Bad, il joue un Floyd Landis brisé, déchiré par le scandale du dopage. Cependant il est, à
mon sens, vu comme un personnage beaucoup trop "innocent". Frears veut que l'on s’apitoie clairement sur son sort. Dès
son apparition, il est montré comme un bleu déçu de voir
Armstrong, son héros, et les autres de l'équipe se doper sans
aucune peine. Il regrette ce choix de facilité qu'il va aussi
prendre. La vérité est quand même tout autre. Il a énormément
abusé durant sa carrière des mêmes produits, a profité du système
et a continué bien après le départ de Lance. Son retrait du
palmarès du Tour de France 2006 est ainsi présenté en quelques
secondes. Or Landis se trouvait dans une nouvelle équipe et n'avait
ni Armstrong, ni Bruyneel dans son dos. Néanmoins sa chute se
termine de façon intéressante (je vous en laisse la surprise) et
même si je tergiverse un peu trop sur le personnage, je comprends
bien la volonté du scénariste John Hodge voulant relier toutes ces
situations sur un seul et même personnage secondaire.
En revanche,
du côté de Guillaume Canet interprétant le rôle du médecin Michele
Ferrari, il y a un gros problème. Un énorme même. Je n'ai pas pour
habitude de tirer sur l'ambulance mais là je vais y aller avec un
RPG-7. Canet est LA grosse erreur du film. Pourquoi prendre un acteur
français qui ne sait même pas parler italien ni accentuer sur les
bonnes syllabes au lieu de prendre un VRAI italien ? Est-ce due
à la demande de StudioCanal d'avoir un casting à moitié
francophone ? Peut-être. Mais le mal est fait. On dirait
Jean-Michel après 3 Picons lors de l'apéro de 15h au PMU du coin un
dimanche de match. Va te racheter du talent.
Tiens en parlant de référence, on retrouve en Lance Armstrong les
aspects typiques d'un personnage scorsesien, à qui tout lui réussi
de prime abord, où la "rédemption" a un goût fortement amer en guise de conclusion. Tout comme Henry Hill dans Les Affranchis, il aurait continué
à enfreindre les règles s'il ne s'était pas fait choper. Après
tout, il est bien revenu une fois et aurait continué d'utiliser son
image par pur narcissisme. On retrouve
également cette influence notable dans la bande originale du film, où Frears se lâche ostensiblement
(Ramones, Lemonheads, Black Rebel Motorcycle et j'en passe...).
Mais la principale force du film selon moi est que Frears n’hésite
pas à écorcher le monde du sport en général, comme le souligne la
scène hallucinante, et tristement vraie, où l'UCI (l'Union Cycliste Internationale) s'excuse auprès
d'Armstrong de l'avoir contrôlé positif en 2005 et ce, bien
évidemment, sans avoir publié la nouvelle. Il taille dans le lard le bonhomme. Instance, sponsors,
compétiteurs, tous fermaient les yeux car Armstrong était la
vitrine de ce sport, qui venait à l'époque de subir juste avant,
ses heures les plus sombres. Lance devait être à la base le
parangon du renouveau du cyclisme mondial. Ceci n'était qu'une
farce. Depuis, ce sport fabuleux et légendaire a encore cette
cicatrice qui lui colle à la peau. Elle ne pourrie plus, ne saigne
plus, mais reste apparente.
Roland aka Francis Hustler
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