14/04/2014

CRITIQUE : HOW I LIVE NOW (Kevin Macdonald - 2013)

BOULE A NEIGE

C'est l'histoire de Daisy (Saoirse Ronan), envoyée par son père chez des cousins éloignés pour les vacances d'été. D'abord réfractaire, elle y fait la rencontre d'Eddie, Isaac, Piper et Joe qui l'accueillent avec plaisir dans leur maison nichée dans la campagne anglaise et délaissée par leur mère. Une mère occupée à gérer la crise qui éclate un peu partout dans le monde...



Au delà de l'image de carte postale, du surex "in my dream" qu'on peut croiser dans ce film, on a entre les lignes et dans presque tous les plans, la fougue de l'adolescence. Elle a la force suffisante pour se faire un chez soi. 
Devenue captive des forces armées qui créent un nouveau système de "résistance" face à la crise (travail de récolte imposé à la population, règles d'hygiène, eau coupée, logée chez l'habitant dont les sols des maisons tapissés de bâches ont fait disparaître toute l'individualité propre à ce lieu), Daisy fait ses réserves et s'enfuit, accompagnée de la petite Piper, avec une seule idée en tête : retourner à la maison.


Une nouvelle maison pour Daisy, construite après un passé douloureux, après maintes fuites, errances, perte de boussole, le long d'un chemin détourné sur lequel luttent des racines blessées, des souches à vif. Une nature aride, démembrée de ses arbres, jungle où l'on se perd, où l'on se cache et où l'on se salit. L'immersion dans la nature est assez bien vue d'autant que Daisy est marquée dès le départ par son physique urbain plus que floral. Elle arrive tout de même d'un aéroport bondé pour rejoindre une voiture garée "à l'arrache" sur un chemin de terre, derrière des barbelés qu'on enjambe. Une voiture conduite par un garçon trop jeune pour avoir le permis : l'adulte brille déjà par son absence. Tout se joue dans la forêt : la fuite des pensées négatives, l'arrivée d'une nouvelle famille, la déchirure, le drame et le traumatisme (l'image de Daisy sur le tas de dépouilles humaines). La forêt est l'antre "passage" des contes de fées, et donc un parfait décor pour cette histoire d'enfants et adolescents en attente de l'avenir.

Car le film se concentre presque exclusivement sur eux. Que le monde qui tonne et les humains qui tuent restent quasiment en hors-champ met encore plus en relief leur petite bulle d'adolescence. C'est un âge qui a besoin de place, à la fois interne et plein d'explosions. Plus encore dans ce film où les adultes ont abandonné (le père de Daisy, sa tante). Plus d'électricité ? Au moins la télévision ne donnera plus de mauvaises nouvelles. Ils continuent à jouer, avec la facilité d'arrêter le temps qu'ont les enfants. Dans cette petite bulle de nature, la neige s'invite en été. Son apparition est un temps joliment enfantine, mais très vite elle se mue en confettis dangereux provenant du monde derrière leur forêt (les résidus d'une explosion nucléaire).

La boule à neige du futur est nocive pour l'Homme, l'eau de ses sources est contaminée. 

Elisabeth qui se veut Daisy n'écoutait personne, et ignorait tant bien que mal les voix dans sa tête, musique à fond sur les oreilles. Au cœur de la boule à neige, Daisy / Saoirse Ronan, dont l'étrangeté a été découverte dans Lovely Bones de Peter Jackson, captive la caméra de son angélisme, sa jeunesse et son regard qui voit loin. Blondeur dessinée sur le ciel défait, Daisy prend le dessus d'un environnement extérieur devenu nuisible, alors qu'elle s'acharnait déjà contre les idées noires immiscées en elle. Saoirse Ronan est la naïveté, l'immatérialité du rêve, la force de l'espoir. Déjà dans le film de Peter Jackson ses yeux bleus ciel abritaient quelque chose de plus grand.

La caméra est attachée à son visage, elle suit ce petit groupe et s'empresse autour de lui, parfois de manière maladroite (trop affolée, floue, rapide), mais c'est aussi ce qui caractérise l'âge mis en valeur par ce film et dont on parlait avant. 
Et puis dans cet empressement, Macdonald capte plus que des détails esthétiques, comme ce plan, alors que le calme est revenu et la maison retrouvée : une statue de pierre entourée de verdures, elle baisse la tête, son regard est sage, sa force n'est plus à prouver, elle a certainement dû voir passer plusieurs âges ; celui qui vient pour Daisy a de nouveaux fondements, plus stables.


Si la forme cinéma teenage n'est pas évitée par moments – slims rock, pop songs, effets d'images "posters" - ce qui rend surtout touchante cette histoire de Troisième Guerre Mondiale, c'est que la fin du monde et le film catastrophe, c'est dans la tête de Saoirse Ronan.

HOW I LIVE NOW - Royaume-Uni - Kevin Macdonald - 2014 - avec Saoirse Ronan, Tom Holland, Anna Chancellor, George MacKay

CHARLOTTE

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